LE REGARD DE JACQUES BENILLOUCHE POUR TRIBUNEJUIVE.INFO
MARINE ISRAÉLIENNE : BASE DE LA NOUVELLE DISSUASION
Sous-marin Dolphin |
Pour sa défense tout azimut, Israël a dépassé l’ère de
l’aviation, des drones et des missiles pour concentrer sa stratégie sur la
marine de guerre qui avait été longtemps délaissée au profit de la défense aérienne
et terrestre. Progressivement, les sous-marins sont devenus le point de mire de
Tsahal qui tient à transmettre un message clair à tous les États qui lui sont hostiles
en leur faisant comprendre que les distances ne sont plus un handicap dans sa
stratégie militaire.
Le Dolphin
Le commandant de la marine Ram Rothberg et le directeur du ministère de la défense Udi Shani |
Le premier ministre Benjamin
Netanyahou n’a pas manqué d’ailleurs de donner une grande couverture médiatique
pour fêter la réception du cinquième sous-marin Dolphin. Accompagné du ministre de la défense, il s'est rendu dans la base navale militaire d'Ashdod pour s'entretenir du nouvel «atout stratégique» ayant un pouvoir
de dissuasion dépassant les frontières. Le renforcement des capacités des
forces navales était devenu nécessaire après les révolutions qui ont agité le
monde arabe. Cependant, beaucoup d’inconnues restent à résoudre, le positionnement de l’armée
égyptienne en particulier.
Israël est désormais équipé de cinq sous-marins
Dolphin, de haute technologie et attend le
sixième en cours de construction. Après la guerre du Golfe de 1991, Il décida
de commander auprès de l’Allemagne deux nouveaux sous-marins conventionnels selon
un contrat signé avec des conditions très avantageuses consenties par le
gouvernement dirigé alors par le chancelier Helmut Kohl. En 1994, un troisième
submersible fut commandé par Israël.
En 2006, Israël commanda deux autres sous-marins (INS Tannin et INS Rahav), avec un autre en option. Par rapport à leurs prédécesseurs, ces bâtiments, prévus pour entrer en service en 2013 et en 2014, disposeront d’un système de propulsion anaérobie, ce qui leur permettra de rester en plongée plus longtemps. Berlin avait longtemps hésité à fournir le sixième sous-marin commandé, en raison de la politique de construction dans les implantations de Cisjordanie, mais il a finalement donné son accord pour que le bâtiment soit construit.
En 2006, Israël commanda deux autres sous-marins (INS Tannin et INS Rahav), avec un autre en option. Par rapport à leurs prédécesseurs, ces bâtiments, prévus pour entrer en service en 2013 et en 2014, disposeront d’un système de propulsion anaérobie, ce qui leur permettra de rester en plongée plus longtemps. Berlin avait longtemps hésité à fournir le sixième sous-marin commandé, en raison de la politique de construction dans les implantations de Cisjordanie, mais il a finalement donné son accord pour que le bâtiment soit construit.
Ehud Barak avec le ministre allemand de la défense Thomas de Maiziere à Berlin en mars 2012 |
L’accord de vente avait été signé par Thomas de
Maizière, le ministre allemand de la Défense et Ehud Barak, son homologue
israélien. Et là encore, Berlin a mis la main au portefeuille car l’Allemagne avait
accepté de financer un tiers du prix de ce sous-marin, soit 135 millions d’euros.
Dérivé du type U-212 et aux dimensions relativement modestes, le sous-marin
commandé par Israël sera mis en œuvre, comme ses prédécesseurs, par un équipage
de 30 hommes. Il peut emporter des torpilles ainsi que des missiles et des
mines. La rumeur dit que ces submersibles pourraient être armés par des engins
dotés d’ogives nucléaires … Mais personne, hormis
leurs équipages et les responsables israéliens, ne peut avoir de certitudes à
ce sujet en raison de
la censure militaire. Proportionnellement à la taille du pays et à l’importance
de la population, Israël peut être classé relativement comme la plus grande
force militaire maritime mondiale.
Fabrication locale
Depuis l’affaire des vedettes de
Cherbourg et dans une volonté d'autonomie,
Israël s’est lancé dans la fabrication, dans ses usines de Haïfa, de ses
propres navires d'attaque de 4ème génération qui prirent le nom de Reshef. Le succès
a été tel que neuf patrouilleurs de ce type ont été commandés par l'Afrique du
Sud. Ces vedettes, ainsi que des navires lance-missiles achetés à l’étranger,
lui permettent de patrouiller autour de ses frontières maritimes. Mais Israël
ne se contente pas de naviguer dans ses eaux territoriales. Il lui arrive
souvent d’envoyer quelques navires dans
les eaux internationales, du Soudan par exemple, pour des opérations
clandestines et pour poursuivre des groupes terroristes qui transportent des
armements en direction du Sinaï.
Le directeur du ministère israélien de
la défense, Udi Shani, a expliqué que la marine, comme les autres armées, avait
étendu son champ d’application et participait au développement des nouvelles
technologies militaires sensibles, de hautes précisions, utilisées pour la
conception de nouvelles armes. L’usine Rafael, qui
fabrique différents types de missiles, équipe en matériel original les nouveaux
sous-marins. Cette entreprise vient d’ailleurs
de développer un système d’alarme original, installé dans les bases navales,
capable de détecter toute intrusion dans les eaux israéliennes.
La marine était restée le parent
pauvre de l’armée face au budget de la force aérienne. Mais Israël a changé sa
stratégie. Le problème iranien a en effet incité Benjamin Netanyahou à augmenter
les investissements dans la marine, tenté
en cela par le rabais de 30% consenti par Angela Merkel sur le prix initial du
sous-marin. En effet, la menace n’est plus locale mais internationale tandis
que les origines des conflits sont de plus en plus géographiquement éloignées.
Révision stratégique
L’ancien ministre de la défense, Ehud Barak, piètre
politique certes, a cependant joué un rôle clé pour imposer la révision des
investissements à destination de la marine. Il avait tenu compte des
recommandations du professeur Efraim Inbar, directeur du centre d’études
stratégiques de l’université Bar-Ilan, qui avait
attiré l’attention des autorités sur le risque que faisaient courir les
révolutions arabes sur la liberté de circulation des navires israéliens. Il avait
rappelé que les échanges maritimes israéliens pèsent pour 90% dans les
échanges internationaux. Les stratèges militaires se sont alors penchés sur les
voies maritimes sous contrôle arabe ou islamique ; le canal de Suez et les
détroits de Bab Al-Mandeb, d'Ormuz et du Bosphore prirent alors une importance
stratégique pour Israël. Une intervention des groupes djihadistes contre les
navires israéliens devenait fortement probable et il n’était pas question pour Tsahal
de sous-traiter aux Occidentaux la sécurisation de sa flotte civile.
Un nouvel élément a justifié la
décision gouvernementale. L’exploitation off-shore du gaz israélien au large de Haïfa
impose une surveillance accrue du site avec le développement des patrouilles
maritimes devant intervenir loin des frontières du pays. Or le Hezbollah, qui
maintient la pression sur Israël, a laissé entendre qu’il pourrait cibler les
gisements de gaz en cas de conflit ouvert.
Les officiers de l’État-major
israélien ont par ailleurs justifié l’extension des moyens de la marine
par la nécessité d’envisager des frappes à partir de sous-marins si
Israël était attaqué. Bien qu’Israël ne l’ait jamais admis, il serait en
possession de 200 ogives nucléaires selon les estimations occidentales. Les sous-marins
israéliens, équipés d’ogives nucléaires, peuvent alors être déployés dans des mers
hostiles, avec une très importante maniabilité opérationnelle. Ils peuvent s’installer
au large des côtes de tout pays ennemi, l’Iran par exemple, pour espionner les
communications, pour contrôler les mouvements des avions et des missiles et le
cas échéant pour intervenir si Israël était attaqué.
Nouvelle donne militaire
Cette situation change la donne au Proche-Orient et
influe sur la stratégie israélienne. Il n’est plus nécessaire de mobiliser une
centaine d’avions pour attaquer les cibles nucléaires iraniennes avec les
risques énormes que comporte une telle expédition. L’opportunité d’une attaque
est d’ailleurs discutée aux plus hauts échelons militaires parce qu’elle ne
semble plus revêtir d’urgence au point que, en suivant les analyses persistantes
du Pentagone, le risque nucléaire iranien est remis en question. La dissuasion
maritime et nucléaire israélienne a fait son effet auprès des Iraniens. Par
ailleurs, le changement de gouvernance à Téhéran reporte de facto, pour un an
au moins, tout risque de conflit. D’ailleurs il est probable qu’un changement
de sémantique de la part des dirigeants iraniens remette en cause leur volonté
d’éradiquer Israël. Ainsi, l’éventualité d’une frappe militaire sur les usines
nucléaires s’éloigne au profit d’un dialogue déjà entamé par les États-Unis,
parallèlement à l’accroissement des capacités militaires d’Israël.
Les nouveaux membres d'équipage de la flotte de sous-marins de la Marine israélienne |
Mais Tsahal veut donner à ses sous-marins
de nouvelles fonctions pour augmenter le pouvoir de dissuasion. Il songe à
organiser des missions clandestines lointaines car les nouveaux sous-marins
peuvent rester sous l’eau pendant plusieurs semaines, sans nécessité de
remonter à la surface pour se ravitailler en air ni même d’user de périscope.
Israël détient déjà l’expérience d’une opération montée à l'autre bout de la Méditerranée, à l’aide à l’époque de moyens modestes. Israël avait liquidé en 1988 Abou Jihad, bras droit de Yasser Arafat, dans sa villa de Sidi-Bou-Saïd. Les membres du commando, venus par voie aérienne civile et à bord de navires civils et d’un sous-marin, avaient été exfiltrés à bord du sous-marin qui stationnait au large des côtes de Tunisie et à bord duquel avait pris place le chef d’État-Major lui-même.
Israël détient déjà l’expérience d’une opération montée à l'autre bout de la Méditerranée, à l’aide à l’époque de moyens modestes. Israël avait liquidé en 1988 Abou Jihad, bras droit de Yasser Arafat, dans sa villa de Sidi-Bou-Saïd. Les membres du commando, venus par voie aérienne civile et à bord de navires civils et d’un sous-marin, avaient été exfiltrés à bord du sous-marin qui stationnait au large des côtes de Tunisie et à bord duquel avait pris place le chef d’État-Major lui-même.
Israël souffrira moins de son sentiment d’encerclement
grâce à ses capacités maritimes surdimensionnées qui ne permettront à ses
ennemis de bénéficier de sanctuaires lointains. Mais dans un souci de
prévoyance, l’Iran n’est plus seul dans l’œil de visée des militaires
israéliens. Israël craint que les troubles internes et l’aggravation de la
situation économique en Égypte, ne poussent ses dirigeants à envisager la
reprise des hostilités, par mer, pour détourner l’attention de sa population dans
une action symbolique visant à briser le
blocus maritime de Gaza. Il est probable que les Égyptiens réfléchiront à deux
fois aujourd’hui.
Soldats de l’Unité des Missions Sous-marines |
Mais paradoxalement, comme au temps de la Guerre Froide,
cette dissuasion éloigne tout danger immédiat de guerre parce que le pays, qui
en serait l’initiateur, prendrait alors un risque suicidaire. En revanche nul
ne peut présager du comportement de groupes extrémistes terroristes islamiques
capables de semer le trouble à travers le monde. C’est pourquoi Netanyahou a
pris bien soin de développer des nouvelles unités capables d’opérations
secrètes, à l’instar de l’escadron-7 la puissance d’attaque sous-marine. Ses missions
sont frappées de secret absolu car elles sont souvent menées au cœur du
territoire ennemi. Toute la stratégie israélienne a ainsi été révisée avec le renforcement
de ses capacités navales pour intervenir en tout point du Globe contre les
ennemis actifs d’Israël et sans attendre qu’ils interviennent à ses frontières.
http://www.tribunejuive.info/israel/marine-israelienne-base-de-la-nouvelle-dissuasion
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