LES ÉLECTIONS ISRAÉLIENNES
3/ LE PROBLÈME PALESTINIEN
Par Jacques BENILLOUCHE
La méthodologie pour résoudre le problème palestinien n’est presque
pas abordée par les candidats qui se
contentent de s’y référer rapidement, alors que les électeurs attendent de
connaitre la façon dont ils comptent le régler. Quelques déclarations éparses
permettent de situer la position des candidats sans qu’un texte écrit n’ait été
publié pour servir de référence. Ce sujet est celui qui suscite le plus de
clivage dans les milieux politiques et au sein d’un même parti ;
c’est pourquoi les candidats évitent de l'aborder.
LIKOUD – ISRAEL BEITENOU
Le premier
ministre Benjamin Netanyahou avait, dans son discours à l’université de Bar
Ilan en juin 2009, abordé l’idée de «deux États pour deux peuples». Il
avait accepté l’établissement d’un État palestinien démilitarisé aux côtés
d’Israël : «Il s’ensuit que la condition préalable fondamentale pour
mettre fin au conflit est la reconnaissance publique et catégorique d’Israël en
tant que patrie du peuple juif par les Palestiniens». Ce futur État
palestinien, totalement démilitarisé, sera sans armée, sans moyens aériens et
n'aura pas le droit de nouer des liens avec l'Iran ou le Hezbollah.
De ce point de
vue, la divergence est marquée avec Avigdor Lieberman et au sein même du
Likoud. En effet le programme du parti, confirmé par le ministre de l’éducation Gideon Sa’ar, esquive
la reconnaissance d’un État palestinien tandis qu’Israël Beitenou rejette
catégoriquement la possibilité qu’un État palestinien puisse être établi aux
côtés d’Israël.
Moshé Feiglin,
qui représente l’extrême-droite au sein du Likoud, suggère une annexion et un
transfert des palestiniens. «Il faut donner à chaque famille un demi-million
de dollars pour encourager l’émigration». Il a reçu le soutien du ministre Yuli Edelstein tandis
que le député Zeev Elkin, a proposé d’opter pour la technique du «salami»
: annexer les territoires palestiniens par petits morceaux.
Malgré cela Avigdor
Lieberman a beaucoup évolué face au dogme du Grand Israël. Le nationaliste pur
et dur a exposé au quotidien de gauche «Haaretz» des propositions que ne désavoueraient pas la
gauche. Il s’est justifié en qualifiant son appartenance à la «droite
rationaliste, qui estime que l’idéal sioniste n’est plus aujourd’hui accessible
dans son intégralité mais qui sait quelles sont les intentions réelles des
palestiniens et veut agir en conséquence sans se bercer d’illusions».
L’expérience l’a convaincu de choisir le réalisme plutôt que les rêves
insensés.
Il a détaillé sa stratégie: «pour faire baisser la pression
internationale sur Israël et empêcher des décisions unilatérales, il faut
impérativement transférer, au moins partiellement, le poids de la preuve de
bonne foi sur les palestiniens en leur proposant un plan sur lequel ils devront
se positionner. A eux de l’accepter et montrer leur volonté de paix, ou le
refuser et être rendus responsables de l’échec du processus». Il est donc
prêt à donner aux palestiniens une partie de la Cisjordanie.
Tu es assis sur ma chaise !
TRAVAILLISTES
Avoda veut lutter pour la paix et la stabilité au Proche-Orient,
tout en œuvrant sans compromis contre le terrorisme et la violence. La politique de gouvernement envers les
implantations (investissements et constructions) ne changerait pas tant qu'il
n'y aura pas d'accord signé et sans l'assurance du respect de la sécurité de
l'État. Les travaillistes proposent de s’appuyer sur la proposition Clinton en
permettant la reconnaissance d'un État palestinien, dont les frontières seront
l'issue de négociations (les grands blocs d'implantation resteront sous le
contrôle israélien, avec la possibilité d'échange de terres). Le retour des
réfugiés palestiniens à l'intérieur des frontières israéliennes ne sera pas
accordé. Il sera accordé un statut spécial aux quartiers arabes de Jérusalem-Est.
BAYIT HAYEHOUDI
Naftali Bennett défend son projet d’annexer 60% de la Cisjordanie,
en donnant aux 45.000 arabes de cette partie le choix de devenir citoyens
israéliens ou de bénéficier d’un statut de résidents privilégiés disposant des
droits des israéliens mais sans droit de vote. Il propose une autonomie
palestinienne aux 40% restants avec liberté de mouvement totale, gestion
financière et fiscale indépendante mais le contrôle sécuritaire et le contrôle
des frontières restent de la responsabilité d’Israël. Il ne souscrit pas à la
création d’un État indépendant : «Je ferai tout ce qui est en mon pouvoir, à
jamais, pour empêcher un État palestinien d’être fondé en Terre d’Israël.
En réintégrant ces 60 % de territoire, je m’assure ad vitam
aeternam qu’aucun État palestinien ne verra le jour car le concept d’État
palestinien doit être balayé de notre lexique !».
Naftali Bennett a lui aussi abandonné le dogme de l'extrême-droite en déclarant le 14 janvier : «Le Grand Israël n'est plus notre flambeau!».
Naftali Bennett a lui aussi abandonné le dogme de l'extrême-droite en déclarant le 14 janvier :
HATNOUAH
Tsipi Livni a
réaffirmé son attachement à un «État juif et démocratique», et reste
convaincue de la nécessité d'un partage territorial avec les palestiniens pour
préserver la démocratie israélienne. L'ex-ministre a renoncé au rêve du «Grand
Israël» et prône la création d'un État palestinien au côté d'Israël, tout
en exigeant le maintien de blocs de colonies en Cisjordanie occupée. Tsipi
Livni estime que les juifs deviendront minoritaires dans un pays binational où la démographie arabe explose.
La solution sera la création d’un État palestinien démilitarisé,
reconnaissant Israël comme État juif. Tsipi Livni a
reproché au gouvernement de «négocier avec le Hamas, responsable des
attentats contre Israël, et de geler tout dialogue avec l'Autorité
palestinienne de Mahmoud Abbas. A cause de ce même gouvernement qui refuse de
prononcer les mots "deux États", nous avons obtenu un État à l'ONU et
nous avons déjà un État du Hamas à Gaza »
SHASS
Le Shass a une position ambivalente en ce qui concerne les
palestiniens. En effet, la loi religieuse lui impose de lutter pour le maintien
de l'ensemble de la terre d'Israël sous souveraineté juive. Elle lui permet
cependant d'appuyer des concessions territoriales si ces dernières permettent
de sauver des vies. Dans la pratique, le Shass a été relativement fluctuant,
soutenant selon les époques le Likoud ou le parti travailliste en fonction des
avantages financiers qu'il retire de sa participation a une coalition
gouvernementale. Le Shass est formellement opposé à la construction dans les implantations
juives et dans les territoires conquis en 1967 hormis dans Jérusalem-Est.
YESH ATID
Yahir Lapid à Ariel
Yaïr Lapid,
président de Yesh Atid, a précisé qu’il ne fera pas partie d’une coalition qui
ne réactiverait pas les pourparlers de paix avec les palestiniens. Il a posé comme
principe que Ma'ale Adumim, Gush Etzion et Ariel, ainsi que Jérusalem, resteront
sous souveraineté israélienne, et qu'Israël ne devrait jamais permettre aux palestiniens
le droit de retour. Mais il a accusé Benjamin Netanyahu d’avoir «gaspillé
quatre ans sans faire des progrès vers un accord de paix». Il réfute l’idée qu’Israël
n'a pas de partenaire pour la paix. Si Israël ne parvient pas à un traité avec
les palestiniens, alors l'État juif sera confronté au risque de devenir
binational.
Il estime
qu'Israël peut atteindre un accord de paix avec les palestiniens sans avoir à
diviser Jérusalem ou abandonner le contrôle des quartiers arabes. Si Israël se
montre intransigeant sur la question de Jérusalem, comme la position ferme
qu'il a prise sur le droit au retour, les palestiniens renonceront à terme à
leur demande que Jérusalem devienne la capitale d'un État palestinien. Lapid est
contre un compromis territorial à Jérusalem, affirmant que la ville
"restera sous souveraineté israélienne et ne sera pas divisée. Les arabes
vivent dans l'État d'Israël et nous devons apprendre à vivre avec eux".
Même s'il est dépourvu de toute expérience en politique étrangère
et n'a jamais participé à des discussions diplomatiques avec les palestiniens,
Lapid a présenté une vision plutôt optimiste de la question palestinienne :
«Abou Mazen a renoncé au droit au retour parce que les palestiniens se sont rendus
compte qu'il y a un consensus défini dans le public israélien sur cette
question, ils sont donc passés à la rubrique suivante. La même chose doit se
passer en ce qui concerne Jérusalem. Nous ne pouvons pas hésiter sur cette
question. Quand il s'agit de Jérusalem, il n'y a pas de compromis. Si les
palestiniens se rendent compte qu'ils n'auront pas un État s'ils ne renoncent pas
à Jérusalem, alors ils finiront par abandonner cette demande. »
MERETZ
Le
parti d’extrême-gauche Meretz a pris
acte d’une situation sur le terrain qui met à mal le processus entamé à Oslo. Il
esquisse donc, sur les décombres d’accords désormais difficilement applicables en
l’état, un nouveau plan de paix. Il ébauche un plan de paix qui substituerait aux accords
d’Oslo un nouveau programme de sortie du conflit. Suivant ce plan, Israël
aiderait la Palestine à devenir le 194e membre des Nations unies et serait le
premier pays à reconnaître le nouvel État : «Sans vouloir déterminer à
qui incombe la responsabilité de ceci ou cela, il faut remplacer le processus
d’Oslo par un nouveau schéma. Un État palestinien est dans l’intérêt d’Israël,
aussi doit-il être le premier à le reconnaître et à soutenir son admission à
l’ONU.»
Selon
ce programme, Israël mettrait fin à l’occupation sur la base des frontières de
1967, avec des échanges de territoires. La capitale Jérusalem serait répartie
conformément aux propositions de l’ancien président des États-Unis, Bill
Clinton, les quartiers juifs revenant à Israël, les quartiers palestiniens à la
Palestine, et un statut particulier étant réservé aux Lieux saints. Ce plan
propose également la proclamation par le gouvernement d’un gel immédiat des
implantations, qui durerait aussi longtemps que nécessaire à la tenue des
négociations.
Ce
plan préviendrait une déclaration unilatérale d’indépendance de la part des palestiniens
et améliorerait radicalement la position israélienne sur la scène
internationale, en faisant éclater la «majorité automatique» à l’encontre
d’Israël aux Nations unies. Un plan qui «aiderait également Israël à rassembler
une coalition contre l’armement nucléaire de l’Iran». L’État
d’Israël doit être la patrie du peuple juif, mais il doit garantir l’égalité
des droits à tous ses citoyens, y compris aux arabes israéliens.
KADIMA
Le leader de Kadima, Shaoul Mofaz veut qu'Israël conserve les
principaux blocs d’implantations et donne en échange à l'Autorité
palestinienne un territoire de surface identique. Il est clair en ce qui
concerne les résidents israéliens vivant dans les zones qui seraient
cédées : «Si on leur donne les bonnes incitations, ils quitteront leurs
maisons. Il faudra évacuer ceux qui ne le font pas.»
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