L’IDYLLE FRANCO-ISRAELIENNE de 1948 A 1958
Par Jacques BENILLOUCHE
copyright © Temps et Contretemps
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Partie 2/3
Lien pour la première partie :
Vincent Auriol (1884-1966) |
Le problème algérien et Nasser vinrent à point nommé pour orienter une frange politique française vers le soutien au sionisme. Certes les Français qui montrèrent leur sympathie à Israël étaient en majorité socialistes ou juifs mais ils contribuèrent à favoriser l’idylle franco-israélienne. Ces relations privilégiées reposaient sur des liens personnels profonds entre socialistes français et israéliens et donnèrent un élan particulier à l’alliance entre les deux pays.
Vincent Auriol, premier président de la IV° République, sera l’instigateur en 1954 de la signature d’un important contrat d’armement entre le jeune Shimon Pérès et le ministre Catroux, préfigurant ainsi une alliance tacite contre Nasser. Le président justifia ainsi sa décision : «En ce qui concerne la question palestinienne, la donnée fondamentale pour nous est que nous ne pouvions pas admettre la défaite d’Israël. Une victoire arabe se serait traduite par un accroissement de l’agitation en Afrique du Nord. Un État juif au centre du monde arabe était pour nous une garantie de sécurité et d’équilibre».
Le colonel Nasser avait fait son coup d’Etat le 23 juillet 1952 avec l’idée de devenir le champion du panarabisme pour s’identifier à tous les problèmes arabes et au problème algérien en particulier. Depuis 1954, les Français étaient embourbés dans la guerre d’Algérie. Guy Mollet, président du Conseil, et Maurice Bourgès-Maunoury, ministre de la Défense, étaient persuadés que le cœur du FLN était au Caire et qu’en abattant Nasser, ils pouvaient mater la révolte algérienne. Les services secrets israéliens et français, en contact étroit, échangeaient déjà des informations sur les agissements des «terroristes».
Nasser, qui venait de renverser le roi Farouk d’Égypte, chercha un moyen d’asseoir sa gloire précaire par un acte de prestige symbolique en construisant le barrage d’Assouan. Mais le coût exorbitant des travaux ne trouva pas de financement occidental, surtout en raison de la faible solvabilité du pays. Ce refus l’incita, par provocation et par vengeance, à nationaliser en juillet 1956 le canal de Suez et tous les biens franco-britanniques. Il compléta ces mesures de rétorsion en offrant son soutien aux rebelles algériens et en ouvrant ses mers et ses ports aux navires soviétiques. Cela ne pouvait qu’exacerber le conflit avec les autorités militaires françaises et anglaises.
Ce camouflet calculé du leader égyptien conduisit les Anglais et les Français à songer à des mesures militaires inéluctables. La France aurait bien voulu agir seule mais elle n'alignait que quelques escadrilles de Mystère, à court rayon d’action, inutilisables à longue distance. L’Angleterre n’était pas mieux lotie car elle ne disposait pas de base proche de l’Égypte. Alors les deux grands pays cherchèrent à camoufler leur impuissance militaire derrière un écran de fumée diplomatique et des gesticulations.
Dès le lendemain de la nationalisation, Français et Anglais ont envisagé une riposte militaire et leurs États-Majors avaient achevé les préparatifs dès le 15 août 1956. A ce moment-là, il n’était pas question de mêler Israël à l’opération car la France et la Grande-Bretagne répugnaient à se compromettre avec le jeune État hébreu, dont la solidarité avec l'Occident était sujette à caution en raison de ses liens avec le bloc de l'Est. Mais les Anglais, embarqués par les États-Unis dans les méandres de la diplomatie, décidèrent de faire marche arrière et renoncèrent à toute action militaire contre l’Égypte.
Vincent Auriol, premier président de la IV° République, sera l’instigateur en 1954 de la signature d’un important contrat d’armement entre le jeune Shimon Pérès et le ministre Catroux, préfigurant ainsi une alliance tacite contre Nasser. Le président justifia ainsi sa décision : «En ce qui concerne la question palestinienne, la donnée fondamentale pour nous est que nous ne pouvions pas admettre la défaite d’Israël. Une victoire arabe se serait traduite par un accroissement de l’agitation en Afrique du Nord. Un État juif au centre du monde arabe était pour nous une garantie de sécurité et d’équilibre».
La politique nassérienne
Colonel Nasser |
Le colonel Nasser avait fait son coup d’Etat le 23 juillet 1952 avec l’idée de devenir le champion du panarabisme pour s’identifier à tous les problèmes arabes et au problème algérien en particulier. Depuis 1954, les Français étaient embourbés dans la guerre d’Algérie. Guy Mollet, président du Conseil, et Maurice Bourgès-Maunoury, ministre de la Défense, étaient persuadés que le cœur du FLN était au Caire et qu’en abattant Nasser, ils pouvaient mater la révolte algérienne. Les services secrets israéliens et français, en contact étroit, échangeaient déjà des informations sur les agissements des «terroristes».
Maurice Bourgès-Maunoury |
Nasser, qui venait de renverser le roi Farouk d’Égypte, chercha un moyen d’asseoir sa gloire précaire par un acte de prestige symbolique en construisant le barrage d’Assouan. Mais le coût exorbitant des travaux ne trouva pas de financement occidental, surtout en raison de la faible solvabilité du pays. Ce refus l’incita, par provocation et par vengeance, à nationaliser en juillet 1956 le canal de Suez et tous les biens franco-britanniques. Il compléta ces mesures de rétorsion en offrant son soutien aux rebelles algériens et en ouvrant ses mers et ses ports aux navires soviétiques. Cela ne pouvait qu’exacerber le conflit avec les autorités militaires françaises et anglaises.
Nasser annonce la nationalisation du Canal de Suez |
Ce camouflet calculé du leader égyptien conduisit les Anglais et les Français à songer à des mesures militaires inéluctables. La France aurait bien voulu agir seule mais elle n'alignait que quelques escadrilles de Mystère, à court rayon d’action, inutilisables à longue distance. L’Angleterre n’était pas mieux lotie car elle ne disposait pas de base proche de l’Égypte. Alors les deux grands pays cherchèrent à camoufler leur impuissance militaire derrière un écran de fumée diplomatique et des gesticulations.
Représailles militaires
Dès le lendemain de la nationalisation, Français et Anglais ont envisagé une riposte militaire et leurs États-Majors avaient achevé les préparatifs dès le 15 août 1956. A ce moment-là, il n’était pas question de mêler Israël à l’opération car la France et la Grande-Bretagne répugnaient à se compromettre avec le jeune État hébreu, dont la solidarité avec l'Occident était sujette à caution en raison de ses liens avec le bloc de l'Est. Mais les Anglais, embarqués par les États-Unis dans les méandres de la diplomatie, décidèrent de faire marche arrière et renoncèrent à toute action militaire contre l’Égypte.
Les Français se tournèrent alors vers Israël car ils savaient que le jeune et bouillant chef d’État-Major de 41 ans, Moshé Dayan, rêvait d’en découdre avec les fédayins qui traversaient la frontière en apportant avec eux la mort dans les kibboutzim des frontières. Cependant le chef du gouvernement, David ben Gourion, refusait d'autoriser Tsahal à lancer des opérations militaires contre les terroristes au delà de la frontière. Les Français trouvèrent ainsi une oreille très attentive au sein de l’armée israélienne et décidèrent d’encourager sa coopération en lui fournissant l’armement qui lui manquait.
Le Quai d'Orsay |
Ainsi, bien avant la crise de Suez, du 11 avril à la mi-mai 1956, l’armée israélienne avait obtenu la livraison de 24 chasseurs Mystère. Le 23 juin, de nouveaux contrats portaient sur 200 chars, 72 Mystère, 10.000 roquettes antichars et 40.000 obus. Mais ces contrats avaient été signés à l’insu du ministère français des affaires étrangères. De cette période idyllique date le début de l’animosité avec le Quai d’Orsay qui abritait des diplomates issus d’une vieille aristocratie catholique, profondément pro-arabe.
Mufti de Jérusalem |
Le ministre de la Défense Bourgès-Maunoury avait ainsi rapporté qu’en «raison de nos litiges et nos chicanes avec le Quai d’Orsay, il fut convenu que, dans la politique relative à Israël, l’Administration du Quai n’y serait en aucun cas mêlée». Cette mise à l’écart avait été mal ressentie par le Quai d'Orsay qui n’était cependant pas très blanc politiquement car il avait des actes à se faire pardonner. En effet, en 1945, il n’avait pas hésité à aider le mufti de Jérusalem, allié des nazis et recherché par les Alliés, à se réfugier en Palestine. Les diplomates français n’eurent donc de cesse que d’obtenir leur revanche.
Fin de la partie 2/3
L'inimitié, voire l'antipathie profonde et méprisante du Quai d'Orsay concernant les Juifs qui s'installaient en "terre de Palestine" date depuis bien longtemps avant la création de l'Etat d'Israel auquel ses fonctionnaires étaient des plus hostiles flirtant avec l'antisémitisme grossier.
RépondreSupprimerL'ydille dont vous parlez s'est faite hors quai d'Orsay quasiment en catimini pour les gouvernements français qui craignaient toujours de se mettre à dos ce bastion puissant qui fait encore la politique étrangère de la France. L'ydille a ete courte, faite d'intérêts communs momentanés avec Israel par des gouvernements qui considéraient que 'l'Algérie c'est la France".
Une fois cet épisode terminé avec De Gaulle le Quai d'Orsay en phase avec lui( l'inverse est aussi vrai!) est retourné à ses vieux démons virulemment antiisraéliens, fleurtant l'antisémitisme pour ces fonctionnaires de vieille souche catholique d'extrême droite fascinés par une politique arabe de la France.
Rappelons que le Quai d'Orsay est la seule institution française à n'avoir pas subi d'épuration aprés guerre.
Cet anomalie dans cette caste se ressent jusqu'à aujourd'hui lorsqu'on constate ses agissements contre Israel par le biais de son annexe, le Consulat de France à Jérusalem.